Nationalisme ?

Le 11 mai dernier, les Français élisaient leur nouveau monarque après une campagne électorale où il aura été fréquemment question de nationalisme avec l’accession de Le Pen au second tour. Une semaine plus tard, la Fête nationale de la langue bretonne se déroulait à Langoned, avec une assistance bien éloignée des 12 000 personnes comptabilisées en 1997. A l’occasion d’un débat organisé lors de la fête, il est rapporté que certaines personnalités appelèrent à une “fête internationale de la langue bretonne”.

 

La dimension “nationale” de la fête, assumée par les organisateurs, dérange. Rien de bien étonnant à cela. Le concept de nationalisme est connoté très négativement en France et est systématiquement associé à la droite extrême. Nombre de commentateurs ont, pendant la campagne, ciblé Marine Le Pen et “son nationalisme“. S’est ainsi imposée l’idée dans le paysage politico-médiatique français que le nationalisme est une doctrine d’extrême-droite. La progression des nationalistes corses, perçue en France avec une très grande suspicion, ne fait que conforter cette connotation négative dans l’imaginaire français.

 

Le mouvement breton, ce qu’il en reste du moins, tend à s’aligner sur ce sens commun et à renier sa dimension nationale. Au siècle dernier, le nationalisme breton, multiforme car de droite mais aussi de gauche, avait connu une montée en puissance certaine qui ont abouti à un certain nombre de réalisations. Il est aujourd’hui évanescent, tout comme l’Emsav politique, et ce n’est pas un hasard. Nous refoulons notre nationalisme et subissons défaite électorale sur défaite électorale au moment même où les Corses, les Basques, les Ecossais et les Catalans le brandissent en étendard victorieux. Destins croisés.

 

Cette conscience nationale qui s’amenuise en Bretagne n’est donc pas sans conséquence. Sur le plan politique évidemment, les Bretons continuent dans les urnes d’approuver un système hyper-centralisé qui lèse la Bretagne et profite d’abord à Paris. Sur le plan identitaire, on assiste à l’élargissement d’une identité bretonne de pacotille ne reposant plus que sur du vent (une part de plus en plus grande de la population n’a strictement aucune connaissance de l’histoire de Bretagne, de sa culture, particulièrement de sa langue). Sur le plan linguistique justement, la réappropriation de la langue bretonne piétine et le déficit de conscience nationale collective et individuelle chez les acteurs du renouveau de la langue y contribue. J’en veux pour preuve le manque d’entrain de la nouvelle génération de bretonnants à utiliser le breton au quotidien et à le transmettre en famille.

 

Le Pays basque (sud) est un bon étalon de comparaison. Il y existe une corrélation très forte entre connaissance du basque et conscience nationale. Contrairement aux zones non-bascophones, bien moins conscientisées, la zone bascophone centrale est un véritable bastion du nationalisme basque. L’attachement à la langue, à la culture et à l’identité basque y est très puissant et généralisé. Le comportement électoral s’en ressent avec une domination sans partage des partis nationalistes au niveau local, soit orienté à gauche (Sortu), soit à droite (EAJ-PNV).

 

Si la revendication bretonne, politique et culturelle, est aussi insignifiante aujourd’hui, c’est d’abord parce que le nationalisme breton a reflué. L’Emsav n’a pas réussi, contrairement aux Corses, à proposer au peuple breton une voie nationaliste convaincante. Ne serait-ce que dans les mots, plus beaucoup de militants (à gauche particulièrement) n’assument ouvertement le qualificatif de nationaliste (tout comme celui d’indépendantiste d’ailleurs, les deux sont liés). L’étiquette “régionaliste” se développe, et c’est tout sauf un hasard, montrant notre difficulté à assumer une revendication plus radicale. Le sens commun français est en passe de domestiquer la Bretagne révoltée.

 

Revenons maintenant sur cette conception française du nationalisme, considérée dans le langage courant comme apanage de l’extrême-droite. On a envie d’en rire, tellement la campagne présidentielle a montré à quel point le nationalisme est en réalité une doctrine partagée par l’ensemble du spectre politique français, à des degrés divers certes mais globalement de plus en plus décomplexée.

 

L’écrivain et militant basque Jean-Louis Davant vient justement de sortir un livre en basque à propos de ce nationalisme français non assumé par le système politico-médiatique actuel, mais aussi par le français moyen (Frantzia eta nazioa, éditions Maiatz, mai 2017). Ecoutons-le décrire en français cette véritable schizophrénie française :

Dans le livre en question j’essaie d’explorer les arcanes d’un nationalisme français classique, nationalisme profond, inconscient et tranquille : sources, bases, contenus, attributs, conséquences, retombées…

Au terme du voyage, j’ai découvert en statue du Commandeur la figure paradoxale du Français moyen qui me laisse perplexe.

Imbu de principes universalistes, il est souvent un hyper-nationaliste qui s’ignore. Son raisonnement baigne dans l’universel. Il est le prototype de l’homo universalis, le cartésien et l’adepte des Lumières, l’inventeur des Droits de l’homme et du citoyen, le précurseur en tout, donc le modèle à suivre.

Quand il nous dit de façon pathétique : “Mais enfin, soyez comme tout le monde”, cela signifie concrètement et naïvement “soyez comme moi”.

En 1789 il proclama LA Nation universelle, mais la communauté qu’il bâtit est forcément comme toute autre une nation particulière, avec un ancêtre ethnique, le Gaulois, et une langue régionale, celle de Paris, très minoritaire dans le royaume de France qui, bientôt, sera LA République, également universelle.

Il a du mal à saisir le patriotisme des autres peuples, surtout sans Etat : il l’appelle nationalisme.

 

Ce peuple est tellement imbu de lui-même qu’il en vient à nier l’évidence, comme celle de la montée du nationalisme français, chez son personnel politique mais aussi dans toutes les strates de la population. L’alternative est alors la suivante. Soit dénationaliser la question bretonne et la ramener à une simple problématique régionale, avec le risque de diluer la revendication bretonne pour de bon. Soit assumer un véritable nationalisme breton, de défense de notre identité face à ce nationalisme français inavoué, et en même temps ouvert aux évolutions actuelles du monde.

 

 

 

 


Décomposition française

une-affiche-pour-cliquer-sur-oui-la-bretagne.bzhCe lendemain d’élections me donne envie de reprendre la plume après un long silence et de me laisser aller à quelques commentaires totalement désabusés.

Narquois également. C’est con, mais chaque fois que le FN gravit un échelon dans son ascension du pouvoir, je ne peux réprimer une sauvage  et primaire jubilation intérieure. Cette République française tellement révérée, posée comme modèle à portée universelle, et en même temps sur le point de faire advenir l’extrême droite au pouvoir… quelle bonne tarte dans leur gueule à tous ces républicains de mes deux  !

Vient ensuite le temps de l’analyse. Climat de crise sociale et économique, crise démocratique, impuissance des politiques, bouleversements induits par la mondialisation… je ne m’attarderai pas, les médias étant saturés d’analyses du phénomène. Le FN premier parti de France. Une nouvelle digue vient de céder. 34% des jeunes qui sont allés voter ont voté pour Marine…

J’entends des gens en Bretagne qui se réjouissent du “faible” score du FN, d’autres encore qui voudraient être breton parce que nous semblons représenter un bastion réfractaire au FN. 18% !!! Score inimaginable il y a encore quelques années, multiplié par trois depuis les dernières régionales. Et il faut pourtant s’en réjouir. On s’est autocongratulé pendant des décennies en ce croyant immunisés. La Bretagne, complètement intégrée à l’hexagone, suit avec un temps de retard l’évolution nationale. On se prend la claque à notre tour.

Comment cela se terminera-t-il ? Mal. En France, plus ça va mal, plus on invoque la République et ses valeurs. Comme une divinité qu’on gratifie de prières avant une catastrophe inéluctable. La France est en phase de désintégration accélérée. Pas sa structure certes. L’Etat continue de corseter fermement la société. En revanche, cette dernière montre des signes plus qu’inquiétants d’implosion.

Et ces élections régionales, en Bretagne (la Région par excellence !), de quoi ont-elles accouché ? Une abstention d’environ 50%, au niveau de l’abstention en France. Une personne sur deux est restée à la maison alors que les Bretons sont soi-disant intéressés et concernés par “l’idée régionale”. Le pire n’est pas encore là. Sur 11 listes, une régionaliste (Troadeg) et deux nationalistes (Roblin et Deleon). Grosse déception chez les régionalistes avec 6 et quelques pour cent, loin des 10% requis pour participer au second tour. Chez les indépendantistes de gauche (“Bretagne en luttes”) et les indépendantistes du centre-droit (“notre chance l’indépendance”), ont se tire la bourre à 0,62 et 0,54%. Devancés par l’UPR de l’inénarrable Asselineau, Debout la France et LO. Je me souviens de certains militants bretons pérorant que les socialistes allaient payer cher la non réunification de la Bretagne dans les urnes… J’en souriais à l’époque !

Les enjeux nationaux ont comme d’habitude phagocyté les enjeux régionaux. La campagne a été rythmé par l’actualité nationale. L’absence d’un espace politique régional s’est une nouvelle fois faite sentir. La  scène médiatique régionale, rachitique et inintéressante, inféodée aux partis parisiens, ne permet pas l’avènement d’un espace de débat spécifique en Bretagne. Pour les jeunes générations, elle est carrément dépassée. On a là un nouveau problème qui se pose. Les jeunes ne lisent pas la presse régionale, ne regardent pas la télé régionale ni n’écoutent les radios régionales. Leur source d’information principale est internet, complétée par les médias parisiens. Ceux qui s’informent le font à l’échelle de la France, hormis exceptions. En conséquence, il devient impossible ou presque de toucher les jeunes bretons sur des questions relative à un projet politique spécifique en Bretagne. Dans ces conditions, ils ne peuvent se forger une opinion éclairée sur la question.

Au passage, je n’ai pu m’empêcher d’être dubitatif pendant la campagne devant l’énergie déployée (et l’argent dépensé) par les partisans de la liste Troadeg “Oui la Bretagne”. Les cartes postales, les affiches omniprésentes, les banderoles, les tractages… C’est sans doute dans mon canton la liste qui a déployé le plus d’énergie. Pour un résultat supérieur à 10% il est vrai. Néanmoins, je reste persuadé que ces modes de campagne sont définitivement dépassés et que le nombre de voix gagnées par ce biais est infime. Les gens ne se forgent plus une opinion par ce matériel de campagne. Le FN, qui n’a absolument rien fait dans le canton, pas une affiche, atteint lui 22%. Tout est dit. Ce sont les médias qui façonnent l’opinion.

A l’heure où l’indépendantisme flirte avec les 50% en Ecosse et en Catalogne, les bretons affichent eux un légitimisme navrant. La France coule et les Bretons s’y accrochent. Difficile de ne pas être extrêmement pessimiste sur l’évolution future de la société bretonne.

L’échec à peu près complet des listes “bretonnes” (quoique le score de Troadeg soit très honorable au vu des précédents) témoigne d’une chose essentielle. Il n’y a pas de traduction politique du sentiment identitaire breton. Il ne peut y en avoir. Les Bretons sont une minorité laminée, pour reprendre les termes de Ronan Koadig, évoluant dans un système politique parmi les plus efficaces historiquement (le centralisme français a longtemps été un modèle dans le monde qui a inspiré l’URSS communiste et l’Allemagne nazie).

La conséquence en est simple. La Bretagne est parfaitement intégrée à l’espace français et sa spécificité ne cesse de se diluer. Tout en France, que ce soit l’enseignement, les médias, l’administration, conduit à produire des citoyens déracinés, individus mobiles et interchangeables. La Bretagne du XXIe siècle tend inéluctablement à devenir une portion quelconque du territoire français. Quand on songe à l’exotisme que représentait la Bretagne pour les étrangers du XIXe !

Aujourd’hui, la langue bretonne survit en périphérie de la société et n’est qu’une abstraction pour l’immense majorité des Bretons (pour rappel, 95% des petits bretons n’ont absolument aucun contact avec la langue aujourd’hui). Quant au fameux chiffre des 90% de Breton se déclarant favorables au breton, tellement réconfortant mais tellement bidon, on constate au quotidien qu’il n’est qu’une prise de position gratuite sans aucune traduction concrète. Que des individus comme Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon se positionnent similairement devrait alerter sur la vacuité d’un tel pourcentage.

La culture bretonne connait une vitalité certaine. Le problème à mon sens  est qu’elle reste cantonnée à une fraction de la société. Un exemple parmi d’autre. Le Telegramme avait fait un sondage sur les Bretons et leur pratique du fest-noz. Résultat édifiant : 80% des Bretons n’ont jamais mis les pieds dans un fest-noz. On mesure là pleinement le caractère minoritaire de la culture bretonne en Bretagne aujourd’hui. La danse bretonne est une pratique parmi d’autres comme l’est la danse country, la salsa ou la zoumba.

Là où cela me parait très problématique est que nous ne créons rien de commun dans la société. Il n’y a aucune pratique culturelle bretonne qui soit partagée par tous les Bretons. On pense à la musique et à la danse, mais on peut évoquer aussi les pratiques ludiques et sportives (gouren, palets, boules, jeux traditionnels…) qui permettent de créer du lien social. Toutes ces pratiques sont noyées au milieu de quantité d’autres. Alors qu’il faudrait hiérarchiser et valoriser les pratiques locales (en incitant les jeunes Bretons à aller vers le gouren plutôt que le judo, la boule bretonne plutôt que la pétanque…), nous n’avons pas les outils pour le faire. Dans ces conditions d’une culture bretonne très loin d’être une évidence pour les Bretons eux-mêmes, il devient extrêmement difficile de l’offrir aux nouveaux-arrivants.

Pour inverser la tendance, il faudrait au préalable régionaliser l’enseignement et instituer un bagage culturel commun à enseigner à tous les élèves aux cinq coins de la Bretagne (chansons, danses, musiques, histoire, jeux et sports…). On permettrait ainsi que les enfants qui grandissent en Bretagne aient une connaissance minimale de la culture du pays. On en est très loin. L’Education nationale reste aux commandes et une telle évolution irait contre son principe sacré d’un enseignement rigoureusement identique sur tout l’espace national. Ce serait toucher à un totem.

Que ce soit sur le plan médiatique ou sur celui de l’enseignement, nous n’avons aucun levier pour inverser la tendance actuelle d’une dilution de notre spécificité, et a fortiori susciter une conscientisation de la population sur ces questions. La jeunesse bretonne est très majoritairement française, de conscience et de culture. Elle brandit d’autant plus haut le gwenn-ha-du qu’elle n’a absolument rien d’autre pour témoigner de son sentiment d’appartenance à la Bretagne.

A cela vient se greffer une problématique que je considère comme l’aboutissement de la politique française de création d’un espace indifférencié. Jamais la mobilité inter-régionale n’a été aussi importante qu’actuellement (cf les enquêtes de l’INSEE et ses projections pour les années à venir). Et rien n’indique un ralentissement, au contraire. Avant les années 2000, la position excentrée de la Bretagne avait relativement limité ces mouvements de population qui touchaient bien plus les zones les plus dynamiques de l’hexagone.

Aujourd’hui, la Bretagne est parfaitement intégrée à ce vaste mouvement de brassage national. Ses jeunes diplômés s’en vont, des retraités prennent la place. Les métropoles bretonnes attirent des ménages et des actifs d’horizons divers, jusqu’aux campagnes qui connaissent un phénomène similaire de départs / d’installations. Le solde migratoire s’annonce dans tous les cas très positif. La conséquence est qu’une part de plus en plus importante de la population bretonne n’aura pas d’attache particulière avec la Bretagne. Un département très dynamique démographiquement comme l’Ille-Et-Vilaine ne peut que connaître à terme une baisse globale de son sentiment identitaire breton (avec les conséquences que cela comporte sur le plan du comportement politique, on le voit déjà avec un Troadeg dans l’incapacité de percer dans le pays rennais).

Le but du propos n’est pas de stigmatiser les nouveaux arrivants s’installant en Bretagne. La mobilité est un droit. Le but est plutôt de pointer les conséquences concrètes sur le plan de l’identité et de la culture bretonne d’une accélération de la mobilité inter-régionale, hyper-valorisée en France. Si les contre-exemples sont légion, il n’en reste pas moins qu’en moyenne, les gens extérieurs à la Bretagne sont moins portés à s’intéresser à la culture bretonne que les Bretons eux-mêmes. Ceci d’autant plus que notre culture n’étant guère promue officiellement, il faut faire un effort pour aller vers elle.

La conjonction de ce facteur de mobilité et des autres mentionnés plus haut (notre impuissance politique, médiatique et dans l’enseignement) me pousse à penser que notre échec est définitif. Les conditions d’un projet politique breton spécifique n’ont jamais été aussi éloignées, et le nationalisme français en pleine crispation ne laissera pas la moindre miette. Les langues de Bretagne ne se redresseront pas, le gallo sera rayé de la carte dans 30 ans et le breton continuera de végéter dans les interstices de la société. La culture bretonne continuera d’être pratiquée par une fraction de la population, l’autre lui restant complètement étrangère. Et nous subirons de plus en plus fort les soubresauts de la décomposition française.

Comme beaucoup de militants l’ont déjà mis en acte, je prône l’abandon du politique pour se replier sur le culturel afin de sauver ce qui peut l’être. Toute ambition politique et culturelle pour la Bretagne peut dorénavant être oubliée.

 

 

 

 

 

 

 

 


“Paotr ar gwez-peupli”

Chapel Gwenezhan

Pevar bloaz zo ec’h aen alies da welet ur paotr kozh hag a veve e-unan, kozh paotr yaouank evel ma oa. D’ober un tamm kaoz gantañ ha da deskiñ traoù en brezhoneg. Maleurusamant emañ a-bouez mervel.

Unan ouzhpenn aet a-raok re abred.

Paotr e barrouz a oa hennezh. Kuitaet ‘neva anezhi e-pad ur c’hrogad da vont da Bariz da labourat. Ne oa ket bet pell o tont en-dro d’ar gêr avat. N’andure ket ar vuhez pell deus e vro, ‘ba ar gêr divent-se. Evel-se ac’hanta e oa aet da vasoner ‘ba ur voest deus e barrouz. E-pad e vuhez ‘na derc’het gant ar memes micher. Ha brevet ar paotr ur wech arriet en retret. Ingal zo. Goude ma ‘neveze poan en e izili e veze en umor vat ordin.

Ha tomm e galon deus ar brezhoneg, abominabl ! Eñ an hini a derc’he da gaozeal brezhoneg deus ar reoù a oa bet oc’h evañ dour deus ar Blomenn (an hini ‘no evet an dour-se ne oaro ket brezhoneg ken, gouez da Bleuzaliz). Pa en em gave ur brezhoneger bennak gantañ, brezhoneg dezhi kenkent ! Ne vanke ket respont en galleg dezhañ avat, eñ ne rae ket a van. Pac’h ae da welet koursoù beloioù e kostez Penn-Ar-Bed ec’h ae en brezhoneg diouzhtu gant tud ar vro. Dislâret a rae ar c’henaoueien hag a embann n’haller ket en em gompren deus an eil penn d’egile deus Breizh-Izel.

Evel-just e oa lorc’h en ennañ o teskiñ traoù d’unan yaouank evelton. Gwech-ha-gwech all e tegasen ma mibien ganin, dezhañ da welet brezhonegerien vihan (ha dezhe da glevet brezhoneg mat). Kalz a blijadur a rae se dezhañ. Alies e c’houlenne ganin hag-eñ ec’h ae war-grec’h an niver a vugale o teskiñ brezhoneg er skolioù.

Tud eveltañ n’eus ket bet nemeur en Breizh-Izel. Tud savet o choukoù, lorc’h en enne deus o yezh ha deus o idantelezh, e-mesk ur boblad a dud pleget o fennoù. Reoù vrudet zo bet o stourmiñ a-enep d’an avel a-benn, evel Anjela Duval, Glenmor, Zavier Grall (pet e oant en deizioù-mañ e Karaez oc’h c’hoût piv e oa an daou vreton-mañ ?). N’ankouaomp ket zo bet tud munud ivez.

A-benn tri devezh amañ ec’h a da vezañ interet. Moarvat ne vo tamm ger brezhonek ebet, evel kustum. Marteze ur “c’henavo” bennak memestra ? Evel-se e vez kont. Ar yezh-vamm, ar yezh gentañ, yezh ar galon, yezh ar vuhez, a raer fae warni en deiz-a-herie.

Ur park ‘neva. Ha war ar park-se ec’h a da vezañ ur gouel prestik evel bep eil bloaz. Daou vilier a dud pe dri en em gavo war ar plas bep noz, e-kreiz Bro-Dreger. War o skritell, tamm brezhoneg ebet, evel bep gwech. War lec’hienn ar gouel, ma vez kont memestra evel an troioù all (n’eus rezon ebet e cheñchfe !), ne vo ket ivez. Ha koulskoude ec’h anavezan brezhonegerien a oad ganin o labourat e-barzh a-volantez vat. E-mesk an dud a brotifo deus ar gouel e vo ul lodenn vat a vrezhonegerien yaouank.

Met dam da betra e tavont evel-se !? Petra zo kaoz ne savont ket o mouezh ? Pebezh rann-galon…

‘Meus aon eo gant traoù evel-se e vuzulier pegen bras eo an touflez etre ar reoù yaouank hag o sevenadur. Hent an adperc’hennañ zo hir ha diaes.

Ma langue va mourir. Elle fut langue de roi et langue de paysan. Moi, je l’ai tétée à une époque où depuis beau temps les rois parlaient des langues choisies dont les mots comptaient moins que les chiffres. Je l’ai tétée dans une basse-cour boueuse, entre quatre vaches, deux vieilles vêtues de noir… Toi là, toi là-bas, vous l’avez vécu pareillement, qu’avez-vous fait de l’héritage ? Hein ? Qu’en avez-vous fait ? Vous qui veniez à pleine veillée nous écouter, rire et pleurer notre joie, de notre plainte ! Où êtes-vous passés ? Vous avez fini dans une bonne petite vie, la maison qui n’en est pas une, le métier qui n’est que de vent, une vie pour rire aussi, une vie à pleurer. Et vous avez laissé crever votre langue, comme le feu dans la cheminée, comme le dernier pied de bardane dans l’enclos. Elle n’avait plus de raison d’être. Pas plus que les têtières de la grange, l’araire ou le pot à châtaignes.

Jan-Dau Melhau, Ma Lenga

Na pa vefen ma-unan e terc’hin d’ober gant yezh ar vro betek an diwezhañ.

Ra vezo skañv douar da vro, “paotr ar gwez-peupli”.


Noms de famille et noms de lieux…

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L’aliénation bretonne connait-elle une limite ? L’indifférence des Bretons face aux menaces pesant sur leur patrimoine culturel, linguistique et historique, est une curiosité bien déprimante dont on se passerait volontiers. Mais il y a peut-être encore plus navrant.

Nos toponymes et patronymes celtiques sont un pan important de notre culture, de notre identité. On sait que l’histoire les a bien malmené. La domination culturelle française a en effet marqué leur orthographe au fer rouge, quand elle n’a pas purement et simplement traduit en français. On ne trouvera donc aucune cohérence dans ce fatras, écrit selon les critères orthographiques du pouvoir dominant.

Un second problème affleure. La grande majorité de la population ne maîtrisant plus le breton, celle-ci ne sait plus dire ces noms de lieux et de famille en breton. Elle les prononce à la française. Conséquence somme toute logique. En revanche, il y a de quoi être effaré par cette francisation généralisée de nos toponymes et patronymes… par les bretonnants actuels ! Les bretonnants de naissance ne montrent pas forcément le bon exemple, certes. Mais là où ça devient préoccupant, c’est de voir les néo-bretonnants utiliser massivement ces formes francisées, ne sachant même comment prononcer leur propre nom de famille.

Du temps où la langue bretonne était d’usage social dans la société, le peuple perpétuait ces noms propres et en créait de nouveaux en bretonnisant les prénoms et noms de famille français. Le processus a été stoppé net. Désormais, on s’achemine dans quelques années vers un scénario où l’on ne trouvera plus qu’une fraction résiduelle des nouveaux bretonnants à même de prononcer correctement noms de lieux et de famille. Concrètement, cela signifiera la perte de ce patrimoine linguistique.

On aura beau avoir de beaux panneaux bilingues, personne ne saura comment le peuple dénommait ces villes et villages, ces cours d’eau et ces collines, ces bois et ces champs. Les noms de famille et les prénoms, n’en parlons même pas. La transmission de tous ces noms propres n’a pas eu lieu, et la formation des nouveaux bretonnants délaisse complètement ce champ. Cela ne relève plus que de la curiosité individuelle de l’apprenant, très aléatoire par définition.

Autre point qui ne cesse de surprendre, beaucoup de néo-bretonnants utilisent l’orthographe francisée, non seulement de leur nom et prénom, mais aussi de leur lieu-dit et de leur commune. En cela, ils ne font que suivre l’ usage administratif officiel. Mais qu’est-ce que cela témoigne ? A mon avis, une absence de réflexion ou une profonde soumission au cadre culturel français imposé. A contrario, bretonniser son nom et son adresse dans tous les actes de la vie, est un geste symboliquement fort qui relève d’une émancipation culturelle et identitaire.

Les Basques, qui n’ont pas de grande leçon à recevoir sur le plan de l’émancipation et de la désaliénation, sont engagés depuis quarante ans dans la voie d’une basquisation complète de leurs noms propres. Les noms de lieux l’ont été immédiatement à la sortie du franquisme, dans les années 1980. L’orthographe espagnole des noms de commune a ainsi été remplacée par l’orthographe en basque standard (“Mutriku” a remplacé “Motrico”, “Gernika” a remplacé “Guernica”, etc.). Là-bas, nulle question d’un bilinguisme ridicule et consternant comme en Basse-Bretagne (“Trégastel/Tregastell”, “Pédernec/Pederneg”, “Prat/Prad”, “Le Rest/Ar Rest”, etc.). Les noms de famille basques connaissent la même dynamique de basquisation avec la démarche “Guk Abizena, zuk ?”, promue par les autorités locales, afin de substituer à l’état civil l’orthographe basque à l’orthographe espagnole (un exemple, le nom “Goicoechea” devient “Goikoetxea”). Résultat, les patronymes basques écrits à l’espagnole sont en très large minorité.

La comparaison Bretagne / Pays Basque montre une fois de plus le fossé existant entre les deux peuples. Le breton, même un minimum conscientisé lorsqu’il fait le choix de se réapproprier la langue du pays, peine à s’affranchir du cadre de domination français. On mesure là pleinement le degré d’aliénation qui atteint la société bretonne.

En réponse, on ne peut qu’inviter à défendre activement ces noms propres essentiels à notre patrimoine et à notre identité :

  • apprendre à prononcer correctement noms, prénoms et toponymes, et les utiliser de manière systématique (même lorsqu’on parle français) ;
  • apprendre à bretonniser les noms français en breton ;
  • utiliser systématiquement à l’écrit la graphie bretonne pour écrire les adresses et les noms bretons de communes, mais aussi sa propre adresse et son identité ;
  • rédiger ses chèques en breton, etc.

L’Exception Culturelle Francaise

 

 

 

 

Kaoc'h ki

Faut pas oublier les majuscules.


La presse à la botte, la preuve par l’exemple

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Il n’est pas un jour maintenant sans tribune et communiqué à propos de la réforme territoriale. La tribune des “maires de l’ouest” parue lundi, appuyant la fusion Bretagne-Pays de la Loire, a déclenché une salve de réactions chez les partisans de la Bretagne historique (Bretagne Réunie, 44=Breizh, les bonnets rouges, Kevre Breizh, BZH network, Produit en Bretagne, etc). Les politiques les plus en vue sur le dossier ont également contre-attaqué, de (très) belle manière : les élus EELV, Marc Le Fur et le président du Conseil régional de Bretagne Pierrick Massiot. La lettre ouverte de ce dernier, intitulée Lettre à la Bretagne, est en tout point admirable. Elle est parue mardi dans la presse régionale bretonne.

 

On va constater qu’il est très instructif de comparer sur internet le traitement par les médias régionaux des tribunes respectives des “maires de l’ouest” et de Massiot. Lorsque l’on tape “maires de l’ouest fusion bretagne pays de la loire” dans google, voici les liens des médias et collectivités apparaissant en première et deuxième page :

Libération

France 3

Le Parisien

Ouest-France

France 3 Bretagne

Nantes Métropole

Le Telegramme

France 3 Poitou Charentes

Metronews

France 3 Pays de la Loire

Le mensuel de Rennes

Presse Océan

La gazette des communes

Ceci sachant que la tribune des quatre barons est publiée sur le site internet de Ouest-France, avec un article supplémentaire détaillant les arguments de ces-dits élus.

La même opération en tapant “Pierrick Massiot Lettre à la Bretagne” dans Google donne ceci :

7seizh

Le Parisien

France3 Bretagne

Bretagne.fr

44Breizh

Bretagne Réunie

On constate un traitement médiatique complètement inégal, en faveur des “maires de l’ouest”. Ouest-France et Le Télégramme, sur leurs sites internet, ne consacrent pas une page, pas une ligne à la tribune de Massiot. Si cette lettre ouverte n’avait pas été diffusée sur le site de la région, et reprise par les mouvements pro-réunification, elle n’existerait pas sur internet. Par ailleurs, aucun média présent en Loire-Atlantique n’a relayé l’existence de cette tribune (ni France 3 Pays de Loire ni Presse Océan ; pour la version départementale de Ouest-Torch, on leur fait confiance pour ne pas avoir publié la tribune). On prend là conscience du mur médiatique patiemment érigé entre Bretagne et Loire-Atlantique.

 

Ah, au fait, on se demandait aussi pourquoi Cuillandre défendait la fusion Bretagne-PDL, alors qu’un tel découpage renforcerait nécessairement la position excentrée de Brest. On vient de comprendre pourquoi. L’édile s’est fait élire lundi pour deux ans à la présidence du pôle métropolitain Loire-Bretagne (un machin qui met en réseau les métropoles des deux régions). On lui a fait son petit cadeau, le voilà bien au chaud.

 

Pour rappel, la liste des “élus de Bretagne” (tous socialistes) opposés à la réunification de la Bretagne historique, tout autant qu’à la proposition d’une Assemblée de Bretagne fusionnant les conseils généraux et le conseil régional :

Marylise LeBranchu (ministre à la fonction publique)

Pierre Maille (président du CG du Finistère)

Jean-Louis Tourenne (président du CG de L’Ile et Vilaine)

Claudy LeBreton (président du CG des Cotes d’Armor)

Bernard Poignant (conseiller du président)

François Cuillandre (maire de Brest)

Emmanuel Couet (président de Rennes métropole)

Johanna Rolland (maire de Nantes)

Nathalie Appéré (maire de Rennes)

David Samzun (maire de Saint Nazaire)

 

 

Des rassemblements sont prévus samedi à 16h00 à Brest et Nantes pour dénoncer ce déni de démocratie.

 


La réunification de la Bretagne enterrée ?

GenaouienLa belle brochette de connards.

 

C’était évidemment trop beau. Il fallait se douter que les réseaux jacobins allaient réagir devant la perspective d’une réunification de la Bretagne historique. Pour l’idéologie républicaine, et ses nombreux laquais, la résurgence d’une telle entité historique représente une véritable abomination, la menace incarnée de l’unité du pays et de son fonctionnement hypercentralisé.

 

Pourtant, on pensait il y a quelques semaines assister à un véritable tournant historique. C’était d’abord les annonces sur l’accélération de la réforme territoriale et la réduction du nombre de régions. Puis, le magazine Challenges se procurait la carte à l’étude au ministère de l’intérieur. La Bretagne y est réunifiée. Et là, on se dit que le miracle est à portée de main. La manifestation de Nantes reçoit un écho médiatique important. Le conseil régional de B4 réitère officiellement la demande de rattachement de la Loire-Atlantique. Un sondage annonce que les Bretons sont partisans d’un rattachement de la Loire-Atlantique, et que les “Ligériens”(c) sont les moins favorables à l’unité de leur région. Les médias nationaux parlent du sujet. Beaucoup de signaux sont positifs.

 

Puis est venue la riposte. C’est France 3 Pays de Loire d’abord, subventionnée à hauteur de 300 000€ par an par la région PDL, qui fait purement et simplement disparaître un sondage sur son site internet indiquant 95% de votes favorables au démembrement des PDL. Jacques Auxiette ensuite multiplie les gesticulations pour défendre le périmètre de sa baronnie. Pour ce faire, il convoque le ban et l’arrière-ban des élus et autres subventionnés de la région des Pays de la Loire, pour vanter les réussites et la dynamique régionale. Une campagne de pub dans les médias nationaux, pour la somme de 300 000 €, dénonçant le démembrement annoncée de la région PDL, est ensuite lancée, en même temps qu’un site internet dédié. A cela s’ajoute les multiples interventions dans les médias locaux, à la botte, au premier rang desquels Ouest-Torch. Dernière bouffonnerie en date, avec la complicité de la sinistre ministre de l’environnement Ségolène Royal, l’annonce de la mise à l’étude de la fusion des régions PDL et Poitou-Charentes.

 

Si ce n’était que ça. Les réseaux jacobins de Bretagne se sont alors mis en ordre de bataille. Pierre Maille, Claudy Lebreton et Jean-Louis Tourenne, respectivement présidents des conseils généraux du Finistère, des Côtes d’Armor et de l’Ille et Vilaine, furent les premiers à dégainer. Leur tribune, destinée à sauvegarder leurs baronnies respectives, prenait explicitement position contre un redécoupage “identitaire” (entendre la réunification de la Bretagne) et pour l’Ouest, fusion de la Bretagne et des PDL. Bernard Poignant suivait de peu, lui l’ennemi acharné de la Bretagne et désormais conseiller à plein temps de Hollande depuis que les Kemperiz l’ont saqué, avançait l’idée encore plus farfelue d’une région “Ouest-Atlantique” comprenant Bretagne, PDL et Poitou-Charentes. L’idée a sans doute l’avantage à ses yeux de diluer davantage la Bretagne, jusqu’à en effacer le nom.

 

Hier enfin, alors que le journal La Tribune annonce le renoncement de Hollande à démembrer la Pédélie, vient d’être tirée la dernière salve. Les maires des quatre plus grandes villes de Bretagne, Nathalie Appéré pour Rennes, Johanna Rolland pour Nantes, Francois Cuillandre pour Brest et David Samzun pour Saint Nazaire, accompagnés du président de Rennes Métropole, Emmanuel Couet, battent le tambour et proclament à l’occasion d’une conférence de presse impeccablement relayée par la presse, leur voeu d’une fusion Bretagne-Pays de Loire. L’argumentaire relève du discours technocratique actuel sur la nécessité d’un développement des “métropoles” : on parle d’interconnexions et de réseaux entre grandes villes, de leur rôle en tant que locomotives, etc. Le reste du territoire, ils s’en foutent. Ou ils font semblant de s’en soucier. Ce qu’il leur faut à ces nouveaux caciques, c’est un cadre régional bien mou, bien flasque, pour bénéficier de la marge de manoeuvre la plus large possible. Et quand ils parlent de “solidarité territoriale”, il faut entendre développement forcené des métropoles et territoires ruraux à la remorque.

 

Laissons le mot de la fin à Johanna Rolland, jeune maire socialiste de Nantes adoubée par Jean-Marc Ayrault :

« Nous l’avons vu lors des dernières élections (européennes, NLDR), il devient urgent de rapprocher le politique et le citoyen. C’est à nous, élus locaux, de mettre en place cette réforme sans qu’elle ressemble à un espèce de mécano institutionnel compliqué ».

Et bien oui, chez les jacobins du PS, c’est comme ça que ça marche. Quand on veut rapprocher le “politique du citoyen”, on s’assoit sur l’opinion publique, largement favorable à la réunification de la Bretagne, et on invoque les fameuses et fumeuses coopérations interrégionales Bretagne-Pays de Loire. L’élection européenne vient de leur mettre une claque, mais visiblement ils n’en ont pas encore assez.

 

Du sac les socialos !


Komz brezhoneg d’e vugel (3)

Spot

 

E miz eost er bloaz tremen ‘ma skrivet ar wezh diwezhañ diwar-benn brezhoneg ma mab. Interesant eo sevel ar gaoz war se seizh miz goude.

 

An dro diwezhañ e konten ‘nea e vrezhoneg souzet a-dreñv un tamm mat. Derc’het ‘ma penn bepred : brezhoneg ordin dioutañ. Ha komanset oan da c’houlenn bep tro gantañ respont en brezhoneg din. “Lâr se en brezhoneg ‘ta!”, pa ouien a-walc’h oa kat d’ober e frazenn en brezhoneg, pe “n’eo ket evel-se e vez lâret en brezhoneg” pa responte “oui” din. Ha feiz, ar paotr bihan ‘neus kemeret prim ar pleg da gomz din en brezhoneg. Ma ne veze ket deus an taol kentañ, e veze deus an eil da vihannañ. Gant-se, abaoe tri pe bevar miz eo en em lakeet da gomz brezhoneg diouzhin. Bremañ n’eus ket nemet brezhoneg etrezomp koulz lâret.

 

Ur cheñchamant all zo degouezhet nevez zo. Krog eo da gomz brezhoneg d’an dud all, ar pezh na rae ket a-raok tamm ebet. Bet eo ur pennad o kaozeal brezhoneg diouzhin, ha galleg da toud ar reoù all, na posubl e vefent brezhonegerien. Abaoe ur sizhun, n’on ket kaer petra zo tremenet en e benn, e kaoze brezhoneg deus ar vrezhonegerien. E vamm-ioù-gozh, kamaradoù e dad bet er gêr… kontañ kaozioù a ra en brezhoneg, ha derc’hen a ra gant ar yezh-se. Ha latennet-mat eo ! Stad zo ‘ba e dad, me lâr deoc’h.

 

Ha kavout a ran eo pinvidik e damm brezhoneg d’e oad (3 bloaz ha 2 viz). Arruout a ra d’implij ‘ba e frazennoù stagelloù evel “peogwir”, “goude” ha “pa”, en dibab a ra mat gant ar stumm “meus” “teus” “neus” “on” “out” “emañ”, dispartiañ a ra ervat “din” ha “dit”, “ganin” ha “ganit”, anavezout a ra ar raganvioù “me” “te” “hemañ” “hennezh” “nimp”… Dija eo kat da lâret bern traoù, ha barrek da derc’hen gant e gaoz ur pennad-brav hep tremen d’ar galleg. Fentus eo gwelet anezhañ o kemer poan o sevel e frazennoù, o klask geriennoù brezhonek…

 

Peseurt kentel zo da dennañ deus se ? D’ar skol vrezhoneg ‘h a abaoe miz gwengolo, ha ‘meus aon on bet rekouret ganti. Start eo lâret betek petore poent ‘vat. Dam da se moarvat eo bet kempouezet an div yezh, ha se ‘neus sikouret anezhañ da dispakañ yezh e dad. Er gêr bepred ‘meus derc’het warnañ, ha ‘meus ket lesket anezhañ da respont en galleg din. Bep tro ‘meus goulet e respontfe din en brezhoneg. Nemet ha vefe traoù dibosubl dezhañ da lâret er yezh-se.

 

Da heul ar gaoz oa bet amañ warlene, n’on ket hag-eñ e c’haller komz deus ur “redi” gant ar pezh a ran-me. N’on ket pell avat, da vên ne leskan ket ar galleg kemer plas en hon darempred. Met n’on ket e-barzh ar jeu-se da vat ivez. Feiz, ‘meus ket ar santimant “oblijañ” anezhañ. Chom a ran gant ar “goulenn”. Daoust hag-eñ zo afer d’ober plijadur d’e dad ? Marteze zo bet un tamm, met me a gav din zo estroc’h evit se bremañ. Ret eo lâret e tremenan amzer gantañ ha plijadur a gemeromp hon-daou : c’hoari evel-just, keginañ, ober livaj, bale, c’hoari margodennoù, hag un istor pe div a-raok menel kousket… Bevañ a-bep-sort traoù en brezhoneg kwida, dezhañ da vezañ (kazi) ken naturel hag ar galleg.

 

Bremañ eo lañset mat evit un toullad bloavezhioù. Sañset !

 

 


Le peuple breton et sa langue

monument Tregrom

Dans mon dernier post, j’évoquais ce bretonnant anonyme de Plouared, malheureusement disparu trop tôt. Ancien artisan, cet homme faisait partie du petit peuple de Basse-Bretagne. Sans être militant, il n’en était pas moins viscéralement attaché à sa langue. J’avais eu, il y a trois ans, un merveilleux aperçu de l’affection qu’il portait à la langue du pays. Ma visite de janvier à sa veuve me le confirmât. “Il aimait tellement parler breton !”. Et puis, gravés par lui à n’en pas douter, ces quelques mots dans la pierre : “ar huz-eol”. Juste quelques mots, mais qui disaient avec force son amour pour la langue bretonne.

Ces marques d’affection, j’en constate fréquemment dans ma commune. Je vais en faire une petite compilation ci-dessous. Les commentaires négatifs du genre “il serait plus utile d’apprendre le chinois !” ou “on est en France, on parle français !”, sont eux assez exceptionnels. Il est assez vain d’en tirer une règle générale, et de proclamer que le peuple breton serait indéfectiblement attaché à sa langue. On sait bien que ce n’est pas le cas. Si ça l’avait été, comme au Pays de Galles ou au Pays Basque, la langue se serait autrement mieux maintenue. Mais quand même. Toutes ces petites anecdotes tendent à montrer qu’une partie non négligeable du peuple breton conserve un attachement certain envers la langue, sans pour autant s’insérer dans le discours ou la pratique militante.

Certes, le peuple breton a abandonné sa langue pour lui substituer le français. L’a-t-il fait avec enthousiasme ? C’est ce qu’on serait tenté de croire à entendre certains spécialistes de la question. Voici ce qu’écrivait Fanch Broudig dans le magazine Bretons de décembre 2013 :

Comment expliquer que cette pratique [le symbole] a duré pourtant, en ce qui concerne la Bretagne, pendant plus de cent cinquante ans ?

Cela répondait à une demande sociale. Il y avait une demande évidente pour l’apprentissage du français. Au point que même les initiatives qui ont été prises parfois, notamment dans l’enseignement privé, d’élaborer une méthode d’apprentissage bilingue, pour apprendre le français par le breton, ont été abandonnées. Parce que les parents disaient : on envoie nos enfants à l’école, ce n’est pas pour apprendre le breton, c’est pour apprendre le français.

Sa réponse entre curieusement en résonance avec un exemple que prit Henri Guaino lors de sa violente diatribe du 23 janvier 2014 à l’assemblée nationale contre la ratification de la Charte européenne des langues régionales :

Je voudrais finir par une autre histoire, racontée par Aimé Césaire. Un jour, visitant une école, il rencontra une femme et il lui dit : « On va enseigner le créole à l’école. Êtes-vous contente ? » Et elle lui répondit : « Moi, contente ? Non. Parce que si j’envoie mon enfant à l’école, ce n’est pas pour lui apprendre le créole, mais le français. Le créole, c’est moi qui le lui enseigne, et chez moi ! »

Au passage, on fera remarquer que la mère dit transmettre activement le créole à la maison. Cela fait une différence importante avec le cas breton. Pour le reste, on retrouve le même processus diglossique à l’œuvre en Bretagne et en Martinique, qui conduit les familles à refuser que leur propre langue soit enseignée à l’école.

Que Guaino se contente de cette anecdote brute sans proposer d’éléments de compréhension n’est guère étonnant. Son propos n’est pas d’expliquer la situation diglossique qui produit ce genre de discours, mais simplement de démontrer que l’accès à la langue française est perçue comme une aspiration populaire. De façon similaire, Broudig parle lui de “demande sociale” pour expliquer la permanence sur 150 ans de la pratique du symbole, et même le refus par les familles de toute prise en compte du breton dans les écoles. J’avoue rester perplexe sur ce dernier point, dont je n’avais pas entendu parler jusqu’à présent. L’introduction du breton dans certaines écoles a-t-elle systématiquement été contestée par les familles ? Existait-il une unanimité chez les parents, ou alors les antis obtenaient-ils gain de cause car ayant plus de légitimité que les autres familles ? Ces dernières osaient-elles défendre quelque chose perçu comme allant à rebours de l’évolution de la société française ? Je serai curieux de lire une étude là-dessus.

Dans les deux cas en tout cas, le processus de domination linguistique  est complètement occulté. Au fond, ce n’est guère étonnant. Guaino comme Broudig ont au fond la même préoccupation, disculper la République de sa responsabilité dans l’extinction programmée de nos langues. Pour ce faire, on présente la substitution des langues régionales par le français comme le résultat d’une aspiration sociale, et on élude le cadre linguistique asphyxiant. On pose comme naturel et inéluctable, ce qui n’est en fait que le fruit d’un dispositif linguicide où les langues “régionales” sont considérées à tous les niveaux comme des obstacles à l’unité sacré de la Nation.

Quelle est la part de libre-arbitre et quelle est la part de contrainte dans un tel système diglossique ? Le peuple breton a abandonné sa langue, car la puissance publique lui a enjoint de le faire, insidieusement parfois, de manière coercitive souvent. Par son exclusion de l’espace public et sa dépréciation à tous les niveaux de la société française, on l’a contraint à agir de la sorte. On peut cependant affirmer qu’il l’a, le plus souvent, fait à contrecœur et que cela ne s’est certainement pas déroulé sans souffrances. Les marques d’attachement au breton que je vais à présent énumérer montrent que, dans un cadre linguistique plus ouvert et tolérant, les choses se seraient sans doute passées autrement.

Je précise que ces personnes n’ont pas reçu d’enseignement du breton, et ne sont pas militantes.

femme, environ 55 ans, assistante maternelle : La première fois que je l’ai rencontrée, elle m’avait dit trouver “bizarre” d’entendre un jeune parler breton, en plus de trouver ça “inutile”. Maintenant on se parle breton, et elle parle breton (et pas qu’un peu) à certains enfants qu’elle a en garde ainsi qu’à un de ses fils.

homme, 88 ans, agriculteur en retraite : Il lit chaque semaine l’article en breton de L’écho de l’Armor et de l’Argoat. Souvent il s’y reprend à deux ou trois fois pour relire les phrases, mais dans l’ensemble il parvient à comprendre.

homme, environ 55 ans, agriculteur : Ses deux enfants sont scolarisés à Diwan. Il est abonné à deux magazines en breton. Des poèmes en breton sont encadrés dans son salon. Pas de transmission familiale du breton pourtant.

homme, environ 65 ans, artisan à la retraite : Il possède un dictionnaire breton dans lequel il pioche allègrement les mots qui lui manquent. Il écoute régulièrement RKB. Une fois que je discutais avec lui, un voisin non bretonnant était arrivé. Il ne lui a parlé qu’en breton la première minute, l’autre souriait sans rien comprendre. Il a transmis le breton à son aîné, pas au plus jeune.

femme, environ 75 ans, employée à la retraite : Elle chante dans une chorale de chant en breton.

homme, 82 ans, employé communal à la retraite : Il écoute régulièrement les émissions en breton à RKB ou RBI.

homme, 16 ans : Il comprend assez bien le breton et demande régulièrement à son père bretonnant de lui nommer des choses en breton. Il n’a pas eu de breton à l’école.

homme, 83 ans, maçon à la retraite : Il connait des néologismes bretons assez surprenants. Il est connu pour continuer à parler breton quand la personne en face lui répond en français (alors qu’elle est bretonnante).

homme, 21 ans, manutentionnaire : Il a appris le breton au contact des anciens.

femme, environ 45 ans, secrétaire : Elle-même très bonne bretonnante, elle a mis son petit dernier en filière bilingue en suivant mon exemple. Pas de transmission familiale pour le moment.

homme, environ 45 ans, agriculteur : Lors d’une réunion récente de producteurs de lait à Karaez, il a fait un petit discours en breton.

Ceci sans compter toutes les fois où des personnes, m’entendant parler breton à mon fils, n’ont pu s’empêcher de m’interpeller pour me dire combien il trouvait bien de parler breton comme cela à mon enfant, qu’il fallait préserver la langue…


Daou vloaz war-lerc’h

Ar c'huzh heol

 

Tremen daou vloaz zo ‘ma kontet se amañ. Un tamm kaoz en brezhoneg ‘ma graet war vord an hent, en Plouared, gant un den ha n’anavezen ket. Feiz, ‘ma ket graet nemet lâret un dra bennak en brezhoneg dezhañ… ha hop, lañset oa ar paotr. Selaouet ‘ma anezhañ e-pad n’on ket pegeit. Tri c’hard eur marteze ? E vuhez ‘na kontet din, evel ur gontadenn marvailhus. Mann nemet plijadur. Diwar-bouez ar gaoz-se ‘neva kaset ac’hanon pell. Ha pegen kaer e vrezhoneg non de die !

 

Tremen a rae an amzer, met n’ankouaen ket anezhañ. Penaos ‘mije gallet ankouaat ur gaoz ken dreist-ordinal, gant un den ken dispar-se ? E-sell oan da dont en-dro, met pell on bet a-raok ober. Re bell. Soñj-mat ‘meva pelec’h oa an ti. Aet oan neuze, c’hoant bras  ganin adwelet an den ha toullañ kaoz gantañ. Met daou vloavezh n’eo ket mann ebet. Daoust hag-eñ e kavjen anezhañ, evel oa daou vloaz zo ?

 

Div wezh on bet. Ar wezh kentañ oa war-greiz an deiz. Met un dro c’houllo ‘ma graet. Den ebet er gêr. Ne oan ket sur diouzhin ‘vat. Serr oa ar volejoù, met ur pezh ki oa e-barzh o harzhal diouzhin. Hag ar jardin, feiz, hon ne oa ket derc’het evel e vez gleet. A-raok partiañ ‘ma taolet ur sell war ar vur diavez. Kizellet oa bet war ur maen “Ar huz-eol”. “Amañ, emezon-me, zo unan tomm e galon deus ar brezhoneg. En ti mat on !”. An eil gwezh avat oa bet digoret an nor din. Feiz, ar plac’h-se, oadet, ‘da ket graet nemet damdigoriñ he nor. Gwelet e veze warni ‘deva un tamm mat a disfiz. Ha me o komz dezhi en galleg deus e den diouzhtu, ha goulenn hag-eñ oa er gêr.

 

“Mais… le pauvre est décédé depuis le mois de mars ! “.

 

Un taol bazh war ma fenn. E-pad ul lajad oan chomet mantret. Ha neuze ‘ma lâret dezhi dre benaos oan degouezhet aze, ha ‘ma c’hoantaat ober un tamm kaoz gantañ. “Ah oui, il adorait parler breton ! emezi”. Ha hi o peurdigoriñ an nor hag o pediñ ac’hanon da dont e-barzh. Kenkent ‘ma komprenet en em leske da vont ar paour-kaezh plac’h. C’hwezh ar mallozh doue oa ‘ba ‘n ti. C’hwezh staot oa met ‘ma ket gouvezet petra oa ken oan o tont er-maez. Aze ‘ma gwelet oa un toullad kizhier en o c’hourvez war ar c’hanape. Niñselioù gwenn sklabezet war an douar, n’on ket da betra. Hag ur voutailhad Ricard boulc’het war an daol.

 

Komzet ‘mamp neuze, deus he den dreist-holl.  Ar paour-kaezh paotr ‘na ket ur yec’hed mat. Aet eo re abred bepred. ‘Meus ket gouvezet pet vloaz oa. Lâret a rafen en-dro da bemzek vloaz ha tri-ugent. Ne oa ket arru kozh kozh, na tost ! Ha karet a rae ar brezhoneg, stag oa deus e vro. “Qu’est-ce qu’il aurait aimé échanger en breton avec vous !”. Ha me !!! Ha me… Ne oa ket pell an dour da dont en em daoulagad. Goût a oaren ervat oan tremenet-libr e-kichen un den dispar, c’hwitet un darempred evel n’eus ket nemeur ‘ba ur vuhez.

 

Diwar-he-fenn ‘meus ket gouvezet nemet un dra : normanez eo. Ha sammet ar plac’h gant ar boan-galon, spontus. E-pad ul lajad ne oa ket bet evit ampich da c’harmat dirakon. Un druez oa. ‘Da ket lâret din, met komprenet e veze oa en em serret warni abaoe oa marvet he den. Volejoù an ti a vez serr war an deiz ‘te… Hep mont e-barzh e vez komprenet eo krignet an ti gant ar glac’har.  Kredet ‘ma goulenn ganti hag-eñ ‘deus familh. “Non !” emezi krenn-ha-krak. A-raok dislâret un tamm goude, “j’ai deux filles”. Div verc’h ? Ha koulskoude emañ hec’h-unan-penn aze, prest d’en em deurel d’ar boeson… Poan ‘ma o krediñ. Pet a dud a vez dilaosket evel-henn ?

 

Da diwezhañ ‘dea bet c’hoant da diskwel poltrejoù din. Gallet ‘meus gwelet ervat e benn dezhañ , un tamm mat gwelloc’h evit ar wezh kentañ daou vloaz ‘zo. Abaoe an deiz-se eo moullet e dremm c’hoarzhus ‘ba ma memor, ha moarvat  n’ankouain biken ar penn leun a valis-se.

 

Keuz ‘mo dit e-pad pell, paotr Plouared ha n’ouvezan ket da anv.